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“Les lanceurs réutilisables n’ont pas encore prouvé leur rentabilité économique” Giulio Ranzo, PDG d’Avio

A l’occasion du Paris Air Show 2017, Astronova a rencontré Giulio Ranzo, CEO de la société italienne Avio, constructeur de systèmes de propulsion pour les lanceurs Ariane et Vega notamment. Le dirigeant italien en a profité pour présenter les activités de son groupe et son point de vue sur le marché des lanceurs.

Giulio Ranzo © Avio
Giulio Ranzo © Avio

Vous travaillez actuellement sur Ariane 6, à quel niveau êtes-vous impliqué ?

Sur Ariane 6, nous concevons les boosters du lanceur, baptisés P120. La future fusée sera équipée de 2 ou 4 boosters selon sa version. Nous concevons aussi une partie de l’étage de propulsion et une turbopompe à oxygène liquide sur le moteur Vulcain. Bien entendu, certaines parties d’Ariane 6 seront reprises des lanceurs Ariane 5 et Vega.

 

Quelle relation entretenez-vous avec l’agence spatiale italienne (ASI) ?

Nous sommes le premier contracteur de l’ASI et leur partenaire officiel, un peu l’équivalent d’ArianeGroup avec le CNES en France. Mais nous avons de nombreux accords avec les industriels français. Par exemple, la société Regulus, qui produit du propergol solide (carburant utilisé dans la propulsion des fusées) et qui gère l’alimentation en énergie des moteurs pour les gros lanceurs, est possédée à 60% par Avio et 40% par ArianeGroup.

Selon un récent rapport, plus de 9000 satellites seront envoyés dans l’espace d’ici 2025. La plupart d’entre eux seront de petits satellites. Qui sont vos clients ?

Effectivement, le marché des petits satellites est en plein boom. Nous considérons comme petits satellites, les satellites dont la masse est située entre 1kg (Cubesats) et 400kg (Minisats). Un tiers de nos clients sont des compagnies privées, comme Google par exemple. Un autre tiers sont des institutions civiles, notamment des organisations liées à l’espace. Enfin, le dernier tiers évolue dans le secteur de la défense.

Qui est le principal concurrent de Vega ?

L’Inde dispose d’un lanceur léger qui est actuellement notre premier concurrent sur Vega. Il est baptisé PSLV et il vient tout juste d’effectuer un nouveau vol. En revanche, les ballons stratosphériques ne sont pas prêts de devenir une menace. Non seulement ils ne peuvent pas aller à la même altitude que nos lanceurs, mais en plus, les petits satellites ont besoin d’être lancés en « grappes » si vous voulez que le lancement reste rentable.

Vous venez tout juste de présenter, ici au Salon du Bourget, le projet SSMS (Small Spacecraft Mission Service) à l’ESA. De quoi s’agit-il ?

Il s’agit d’un module, d’un distributeur modulaire en fibres de carbone, dont le but est de créer des constellations de satellites en basse orbite. Le Vega SSMS consiste à envoyer la charge utile dans l’espace puis à placer à des orbites différentes tous les mini-satellites. Grâce à une technologie unique, le distributeur, qui dispose de son propre système de contrôle et de navigation, éjecte un satellite avant de changer d’altitude et d’orbite. Puis en lâche un second de l’autre côté du globe et ainsi de suite jusqu’à ce qu’ils soient tous placés. L’ensemble de ce processus peut durer jusqu’à deux mois, on ne parle plus de lancement spatial mais de croisière spatiale ! SSMS devrait être opérationnel début 2019.

Qui seront selon vous vos prochains clients potentiels dans l’industrie spatiale ?

Ce sera sûrement un mélange de startups et d’agences spatiales nationales. Les startups s’intéressent à notre lanceur car elles ont généralement moins de budget et peuvent donc, grâce à nos services disposer de leur propre satellite. Mais si elles ont besoin d’une constellation (groupe de satellites), il va falloir qu’elles puissent patienter deux mois entre le jour du lancement et la mise en service de l’ensemble des satellites.

SpaceX a réussi à réutiliser le premier étage de son lanceur Falcon 9. Qu’en pensez-vous ?

Je pense que c’est une technologie intéressante. Mais nous ne sommes pas sûr pour le moment qu’elle soit économiquement plus efficace que les technologies classiques, du moins sur le long terme. Mais chez Avio nous réfléchissons évidemment aux lanceurs réutilisables. Pour revenir sur Ariane 6, nous avons construit une usine toute neuve à Colorero, près de Rome. Celle-ci devrait être achevée dès la fin de cette année et sera entièrement dédiée à la fabrication des pièces pour Ariane 6. Nous venons par exemple de finir des boosters qui sont en route en ce moment-même vers la Guyane française. Nous avons également modernisé nos installations au port spatial de Kourou.

Quels contrats avez-vous signé lors du salon ?

Notre partenaire Arianespace, qui s’occupe de la signature des contrats, a conclu un accord pour trois nouveaux vols. L’année prochaine, nous lancerons la mission Prisma pour le compte de l’ASI (Agence Spatiale Italienne) via un lanceur Vega. Et Airbus Defense & Space nous a commandé deux vols sur la nouvelle version de notre lanceur Vega-C. Le premier des deux vols est prévu pour 2019. C’est un vrai succès pour nous car c’est la preuve qu’ils nous font une confiance totale. Ils ont commandé deux vols alors que cette nouvelle version du lanceur n’a pas encore volé. L’une de ces missions concerne l’observation de la Terre et consistera notamment à prendre des photos, donc il y a un gros travail lié à l’optique. Ce salon a aussi été l’opportunité pour nous d’officialiser avec l’ESA le développement de SSMS, mais aussi le projet Vega-C Plus, une version légèrement améliorée du lanceur qui contient quelques fonctionnalités différentes comme la possibilité de livrer plusieurs satellites.

Projet SSMS présenté par Avio au Paris Air Show © Astronova
Projet SSMS présenté par Avio au Paris Air Show © Astronova
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