Culture 12 avril 2020
Yuri’s Night : nuit blanche dans le noir
La Yuri’s Night, c’est un peu le Coachella des space nerds, le 14 Juillet de ceux dont le décollage d’une fusée peut laisser couler une larme, bref c’est THE événement de l’année pour célébrer l’espace, ensemble et à la cool.
L’événement est célébré chaque année dans le monde entier, de Toulouse à Téhéran, en passant par Dallas et Houston au Texas. Oui, au Texas. Comment en est-on arrivé à ce qu’au Texas, terre des Américains les plus américains, on célèbre Youri Gagarine, icône russe et figure emblématique de l’ère soviétique ? Pourquoi ne pas avoir appelé cette soirée Armstrong’s Night? Pour répondre à cette question épineuse, il faut remonter en 1999, date d’inauguration de l’événement. Cette année-là, à l’occasion d’une conférence baptisée Unispace III à Vienne, Loretta Hidalgo Whitesides, George T. Whitesides, et Trish Garner ont l’idée de créer un rassemblement mondial pour célébrer “le passé, le présent et le futur de l’humanité dans l’espace”. Portés par la ferveur de l’évènement, les trois compères se donnent pour mission de créer une large communauté de fans d’espace. Le mot d’ordre est de regrouper ce qu’il se fait de mieux en matière spatiale. On donne alors la parole aux passionnés, on érige les stars du milieu en héros pour inspirer les nouvelles générations, on échange autour d’une space culture toujours plus riche. Tout cela autour d’une grande fête planétaire relayée au sein d’initiatives locales.
La date du 12 avril n’est pas choisie au hasard. Pas parce que c’est la Saint Jules, ce qui n’aurait strictement rien à voir, mais plutôt parce qu’elle coïncide avec deux dates clés de l’histoire spatiale. C’est en ce jour, en 1961, que Youri Gagarine devient le premier humain à voler dans l’espace. Aux yeux des scientifiques, le vol de Gagarine a été l’événement qui a le plus marqué l’Histoire de l’Homme dans l’espace. Il est logique que la fête annuelle de l’espace porte son nom. Tout comme il est logique qu’en Russie, où l’homme en question est considéré encore un cran au-dessus du héros national, le Président Poutine célèbre l’événement. Cette année, il avait d’ailleurs prévu d’inviter le gratin du spatial mondial, mais la réception, plus sobrement intitulée “Journée du vol spatial habité”, n’aura malheureusement pas lieu. La faute au virus.
Le hasard du calendrier fait bien les choses. Puisque, pour ne pas froisser nos amis américains, c’est à la même date, 20 ans plus tard que Gagarine, un certain 12 avril 1981, que la Space Shuttle fit son vol inaugural. Une navette qui, malgré deux échecs retentissant ayant entrainé la mort de 14 astronautes, marqua d’une pierre blanche la conquête spatiale américaine.
Pour revenir sur des choses plus gaies. Yuri’s Night, c’est généralement l’occasion de se repasser les décollages de fusées de l’année. Lorsque la météo le permet, l’odeur de la poudre des lanceurs est remplacée par celle des chipos qui grillent à proximité. Des bières et du coca circulent. Les space geek les plus chevronnés s’en donnent à coeur joie avec leurs costumes de cosplay. Certains d’entre eux prennent la parole pour disserter sur un sujet.
Si l’épidémie de Covid-19 a eu raison des célébrations physiques prévues aux quatre coins du globe, c’était sans compter sur la motivation de certains membres de la communauté des ‘space nerds’. Confinement oblige, l’édition 2020 promet d’être un peu spéciale. Certaines choses ne changeront pas, on sera toujours à des milliers de kilomètres de nos confrères connectés au même moment outre-Atlantique. Vestimentairement parlant, on risque encore de se chercher un peu, entre le survet’/chemise et la panoplie d’astronaute. Mais le contexte devrait pousser les organisateurs à redoubler d’ingéniosité.